Isolement et précarisation sont étroitement liés. Lutter contre la facture sociale : un enjeu qui mérite un plan d’action ambitieux.
Quinze ans que son univers est réduit à quelques mètres carrés, la radio et la TV… Depuis son accident de santé qui l’a laissé hémiplégique, Ruben ne sort plus. Seule présence régulière chez lui, celle de l’aide-ménagère. Et parfois celle de sa fille et de son petit-fils. Branché sur la fréquence juive, il a contacté le Réseau Ezra. Depuis, il fait partie des 180 personnes intégrées dans le programme Brin de Causette, qui offre un appel téléphonique hebdomadaire, tout comme Charles, veuf, dépendant lui aussi des minima sociaux et qui est en rupture de liens avec sa fille. Ou encore Vivette, 87 ans, non-voyante, et dont les enfants habitent en région.
Avec la mise en place des Beaux Dimanches, rencontres conviviales pour les personnes âgées et fragiles, organisées chaque trimestre par le Réseau Ezra, ils attendent avec impatience ces rendez-vous au cours desquels chacun est entouré par les bénévoles et les professionnels, où l’on partage un repas, des animations musicales, dansantes…
Tout le monde convient qu’il faudrait augmenter la fréquence des Beaux Dimanches ; pour Ruben, ils constituent un bouleversement d’un quotidien morne ; « Désormais, j’ai quelque chose à raconter à mon petit-fils», confie-t-il.
C’est quoi au juste l’isolement social ?
Selon le Conseil économique, social et environnemental, il s’agit d’une situation où une personne, « du fait de relations durablement insuffisantes dans leur nombre ou leur qualité, est en situation de souffrance et de danger ».
Véritable fracture sociale, l’insuffisance de relations de qualité impacte sur l’estime de soi, suscite un sentiment de mise au ban de la société, et peut entraîner la dépression. L’isolement accroît la vulnérabilité économique et diminue la capacité de la personne à accéder aux aides et aux soins élémentaires.
Six millions de Français de plus de 16 ans sont concernés, et plus précisément une personne âgée sur quatre.
L’isolement social accélère alors le risque de perte d’autonomie. Il s’agit donc d’un enjeu de santé publique et d’une vraie préoccupation pour le FSJU, à l’initiative du réseau Ezra.
Les solutions du FSJU et du Réseau Ezra
Les appels quotidiens dans le cadre de Brin de Causette sont comme des « rencontres », des moments d’échange singuliers. Souvent les seuls de la semaine pour les personnes appelées. Les bénévoles prennent de leurs nouvelles, s’enquièrent de leur santé, bavardent de tout et de rien. Et alertent s’ils suspectent une dégradation ou si la personne ne répond pas.
A Passerelles, programme de soutien aux survivants de la Shoah mis en place par le FSJU, même démarche.
Les groupes locaux contactent régulièrement des centaines de personnes. Et des rencontres, ateliers yiddish ou judéo-espagnols, groupes de paroles ou petits déjeuners sont organisés dans les quartiers pour maintenir le lien social.
Il s’agit aussi de permettre aux personnes isolées de nourrir des projets pour sortir de leur quotidien ; c’est le sens des Belles Vacances d’Ezra ou de Bel Eté de Passerelles, concept aussi repris par le FSJU Sud-Ouest et Est, ainsi que par le CASIM.
Déployer un réseau d’intervenants solidaires là où l’on manque de bénévoles mobiles, donner corps à cette valeur juive de solidarité envers les plus fragiles : un défi relevé par le FSJU !
Par Rose Mandel dans Communauté Nouvelle n°211